Tarna Silue, doctorant en politiques fiscales et finance digitale

Publié le 22 juillet 2021 Mis à jour le 22 juillet 2021
Date(s)

le 22 juillet 2021

PHDOCTALK. Tarna Silue doctorant spécialiste des politiques fiscales et de la finance digitale.


Parle-nous de ta thèse.

Mon sujet : Inclusion financière et politiques fiscales : réglementation fiscale applicable au secteur des télécoms. Jean-François Brun (Cerdi-UCA-CNRS) et de Zié Ballo (Université Houphouët-Boigny) dirigent mes travaux de recherche.

Je travaille sur la mise en place d’une régulation applicable aux services financiers digitaux fournis par les télécoms. Dans les pays en développement, l’inclusion financière constitue un réel enjeu puisqu’elle permettrait d’atteindre certains Objectifs du développement durable (ODD) notamment la réduction de la pauvreté ou les inégalités de revenus et de genre.
Avec l’essor du numérique, l’accès à une connexion haut débit et la démocratisation des téléphones portables, on a assisté à la naissance de services financiers tel que le “Mobile Money”. Ces services financiers digitaux sont mis en avant pour une réalisation rapide et complète de l’objectif d’inclusion financière dans les pays en développement.

Les principaux fournisseurs de ces services financiers dans les pays en développement sont les opérateurs mobiles, les “Mobile Network Operators”, qui sont fiscalement considérés comme faisant partie d’un secteur à haute valeur ajoutée. Ainsi, le but des administrations fiscales est de parvenir à capter la majeure partie de cette valeur ajoutée, quitte à assujettir ces opérateurs à des codes fiscaux spécifiques. Cependant, introduire des taxes sur les services financiers digitaux en se basant sur cet argument de valeur ajoutée sectorielle pourrait mettre à mal la capacité des opérateurs à investir sur fonds propres et développer l’activité financière.

L’idée avec cette thèse est, d’une part, de présenter l’enjeu macroéconomique de l’inclusion financière digitale pour les pays en développement et, d’autre part, de recommander un système fiscal qui permettrait de mobiliser les recettes fiscales tout en assurant l’inclusion financière digitale totale.


Quel est ton parcours dans l'enseignement supérieur ?

Après l’obtention de mon baccalauréat scientifique, j’ai décidé de me tourner vers l’économie. Je me suis donc inscrit aux Facultés Universitaires Privées d’Abidjan (FUPA) où j’ai réalisé mon premier cycle universitaire ainsi que la première année du second cycle universitaire.

Ce qui m’intéressait le plus, c’était l’économie du développement parce que je souhaite devenir un acteur du développement des pays africains. J’ai eu plusieurs échanges avec des professeurs à Abidjan qui m’ont conseillé de poursuivre mon parcours universitaire à l’École d’Économie de l’Université Clermont Auvergne pour réussir mon projet professionnel. En effet, l’École d’Économie et le CERDI, constituent LA référence académique pour tout ce qui a trait à l’économie du développement. On retrouve d’ailleurs de nombreux anciens doctorants du CERDI dans des think tanks et institutions internationales travaillant sur les questions de pauvreté financière, monétaire et de changement climatique.

C’est ainsi, qu’après avoir été convaincu que la réalisation de mon projet passait par un séjour académique à Clermont, j’ai intégré le master en Analyse économique et développement international (AEDI) de l’École d’Économie. Ensuite, j’y ai réalisé un master en Finances publiques avant de continuer mon doctorat au sein du laboratoire du Cerdi.


Envisages-tu d'enseigner en plus d'être chercheur ?

Je ne suis pas fermé à cette éventualité. Je trouve cela enrichissant et important de partager ma passion de l’économie. Cette passion m’a été transmise par mes professeurs, c’est ce qui m’a donné envie e de poursuivre mes études à un tel niveau. Je reste persuadé que la force d’une économie réside dans sa jeunesse, surtout si cette dernière est bien formée. J’aimerais contribuer à la formation des nouvelles générations en transmettant tout ce que j’ai pu acquérir comme connaissances académiques et professionnelles.

J’ai d’ailleurs déjà mis cela en pratique. En effet, je suis chargé de TD au sein de l’École d’Économie.


Quelle est l'ambiance au sein du laboratoire ?

Je n’aurais pas pu rêver mieux. L’ambiance est tout simplement parfaite !

Je me rends compte que de nombreux doctorants et étudiants qui viennent étudier ici partagent cette même ambition de devenir des acteurs du développement économique.

Le Cerdi est aussi un lieu d’échanges multiculturels. A titre d’illustration, je partage mon bureau avec un collègue burkinabé, une américaine, un ivoiro-burkinabé, ce qui est source d’enrichissement au quotidien, on apprend beaucoup les uns des autres sur divers sujets qui ne concernent pas forcément l’économie. Tout va donc très bien. En plus, on peut compter sur Anneliese pour rehausser notre niveau en anglais et nous faire de bons gâteaux !

Je me suis bien intégré au sein du Cerdi. Tout le monde sait se rendre disponible, cela qui facilite la vie des doctorants. Si on a besoin de quelque chose, on sait qu’on trouvera toujours quelqu’un pour nous aider ou nous écouter.

Le Cerdi c’est bien plus qu’un laboratoire, c’est une famille !

Cette ambiance me parle vraiment parce qu’elle me rappelle celle de l’Afrique de l’Ouest où la famille est très importante. En venant en France j’appréhendais de me retrouver isolé, du chacun pour soi. Ce ne fut pas le cas. Au Cerdi, on se sent vraiment appartenir à une communauté. Quand tu demandes quelque chose, on te dit d’aller voir un tel mais jamais Monsieur un tel. C’est comme si on avait tous nos prénoms mais que le nom de famille, c’était Cerdi ! On essaye vraiment de réduire au maximum les barrières tout en restant professionnels.


Quelle est l'expérience qui t'a le plus marqué ?

C’était une mission de consultant de recherche pour le Ministère de l’économie de Côte d’Ivoire, qui a duré 6 mois et que j’ai réalisé juste après mon master en 2018.

J’étais aux impôts, à la DPESF (Direction de la planification des études statistiques et fiscales), je travaillais sur un exercice d’évaluation des dépenses fiscales. Pour être précis, mon travail portait sur les exonérations de TVA et d’impôt sur le revenu accordé aux entreprises. La contrepartie de ces exonérations de long terme était la réalisation, par ces entreprises, de dépenses publiques qui devraient incomber à l’État ou aux collectivités locales. Par exemple, considérons une entreprise minière qui, pour la réalisation de ses activités, s’installe à proximité d’un village où les populations ont des difficultés à accéder à certaines installations. L’État peut décider d’accorder à l’entreprise une exonération fiscale, mais en contrepartie, on lui demande de construire une école pour les habitants de la région, ou de leur donner accès à l’eau potable ou encore à l’électricité.

Mon travail consistait à identifier ces exonérations, et à faire un suivi économique et social pour voir si, à terme, les entreprises avaient bien investi les sommes qui n’ont pas été récupérées par les impôts et les douanes. Je vérifiais si elles avaient bien respecté leur part du marché.


Que peut-on te souhaiter pour la suite ?

Une belle carrière professionnelle. Une fois la thèse finie, on a certaines attentes. J’espère trouver un emploi en adéquation avec mon profil qui me permette de réaliser mon projet.

Sans oublier, une vie de famille heureuse. Plein de santé, de vie, de bonheur !

http://theses.fr/s216096