Soutenance de thèse. Demande, utilisation et impacts des services climatiques pour l’agriculture au nord de la Côte d’Ivoire.
Julie Bompas
Cerdi, Université Clermont Auvergne
Composition du jury
Douadia Bougherara, Directrice de Recherche à INRAE, CEEM, Rapporteure.
Philippe Delacote, Directeur de Recherche à INRAE, BETA, Rapporteur.
Vianney Dequiedt, Professeur, Université Clermont Auvergne, Interne.
Catherine Araujo Bonjean, Chargée de Recherche, CNRS, Directrice de thèse.
Arona Diedhiou, DR émérite, Géoscience, IRD, Suffragant.
Catherine Simonet, Economiste, AFD, Suffragant.
Philippe Roudier, Economiste, AFD, Invité.
Résumé
Cette thèse CIFRE, financée par l’Agence Française de Développement (AFD), s’intéresse aux
services climatiques (SC) à travers le prisme de la demande, l’utilisation et l’impact auprès des agriculteurs du nord de la Côte d’Ivoire. Les SC se définissent comme tout service diffusant des informations météorologiques ou climatiques visant à guider les usagers dans leurs prises de décision. Deux des trois chapitres reposent sur des données d’enquêtes collectées en coopération avec l’opérateur privé Ivoire Coton et en co-supervision avec des consultants locaux (CIRES, et Hervé Kakou).
Le Chapitre 1 mesure la
valeur relative de l’intégration des savoirs prévisionnels locaux (SPL) dans les SC par une expérimentation de choix mise en œuvre auprès de 285 agriculteurs. Ce chapitre commence par inventorier ces savoirs au nord de la Côte d’Ivoire et la perception des agriculteurs de leur fiabilité. Malgré une confiance plus élevée accordée aux SPL comparés aux prévisions scientifiques accessibles localement, l’intégration de ces savoirs n’est pas déterminante pour faire le choix d’un SC plutôt qu’un autre. Le premier critère de choix est le coût du service, puis, la diffusion orale (radio, coopérative). Seuls, les plus âgés, ont une préférence pour des SC intégrant des SPL. Les décideurs doivent donc privilégier dans cette région des SC oraux et ce, à moindre coût. Toutefois, de plus amples recherches pourraient être mises en œuvre sur la complémentarité des SC et des SPL dans cette zone, compte tenu de la confiance toujours importante accordée par les populations à ces savoirs.
Le Chapitre 2 utilise une
approche expérimentale auprès de 313 agriculteurs pour évaluer : i) l’ajustement de leurs
décisions de semis de maïs en réponse à une prévision de pause sèche, ii) l’impact de cette prévision sur les récoltes potentielles et iii) les facteurs qui influencent leur prise en compte de l’information. Chaque agriculteur répartit ses semis entre une période « précoce et risquée », associée à une probabilité de pause sèche, et une période de semis « tardive », qui garantit des rendements faibles mais certains. Les prévisions communiquées aux agriculteurs varient aléatoirement sur cinq saisons et les choix sont comparés à un scénario sans prévision. Les résultats montrent que les agriculteurs adaptent leurs stratégies en fonction de la prévision, ce qui améliore les récoltes espérées par rapport à une situation sans prévision. Leur choix de semis sont également influencés par les choix précédents et les chocs passés. Les caractéristiques individuelles telles que le locus de contrôle, la volonté d'adaptation et les pertes passées influencent la manière dont les agriculteurs perçoivent et réagissent à la prévision. Ces résultats soulignent le potentiel des formats probabilistes pour communiquer des prévisions à des agriculteurs peu lettrés.
Le Chapitre 3 propose une
revue méthodologique des évaluations ex post des impacts des SC en agriculture. En fonction du contrôle exercé par l'évaluateur sur l'accès au SC, différents problèmes émergent : i) les effets de contamination dans le groupe de contrôle et ii) les biais de sélection pour l'accès et l'utilisation de l'information. Des variables instrumentales permettent de contrôler les effets de contamination parmi les agriculteurs, mais des recherches supplémentaires pourraient être menées pour quantifier leur étendue. Des méthodologies de mesure distinctes doivent être employées en fonction de l’impact mesuré pour éviter les biais de sélection. Les impacts quantifiés se concentrent actuellement sur les rendements et la gestion de l’exploitation. Les cultures de rente, l'élevage et les impacts sociaux et environnementaux sont moins étudiés.
Cette thèse conclue à l’influence majeure de l’hétérogénéité individuelle sur la demande, l’utilisation et l’impact des SC et appuie la nécessité de tenir compte des individualités des agriculteurs afin de maximiser les bénéfices potentiels des SC.
Mots-clés
Services climatiques, adaptation, changement climatique, Côte d'Ivoire, climat, risque.
theses.fr/s363272